Sur l’écran de « Wà Cinéma », vendredi 03 novembre dernier à Le Centre à Lobozounkpa, c’était « Keteke », un long métrage de Peter Sedufia. Le réalisateur ghanéen raconte une tranche de la vie d’un couple. Les amis de ce rendez-vous cinématographique mensuel vivent une soirée qui, entre autres, renforce le courage et la détermination à se fixer un objectif puis envisager et arracher contre vents et marées le moyen ou les moyens pour l’atteindre.
Mettre au monde leur premier bébé au centre-ville Keteke. Boi et Atswei le désirent. Le seul moyen pour y accéder, c’est le train mais ils manquent le premier. Ils décident d’entamer la marche dans l’espoir de rattraper un autre. Au-delà de retrouver un autre train, le défis est aussi d’arriver à destination à l’heure. L’accouchement n’attend pas. Avec de gros bagages en main, commence pour eux dès ici, un chemin de croix entre la vie et la mort de leur premier né. Le risque aussi de perdre la mère.
Sur le parcours, l’histoire met en exergue la vie de couple qui n’est pas de tout repos, le pénible passage de la femme ou d’un couple en général pour donner vie, les difficultés d’accès aux infrastructures modernes de soin de santé notamment pour les zones enclavées avec les obstacles de transport, etc. Certes, Peter parle des années 1980 mais ce sont des sujets encore de grande préoccupation au présent. Mais le cinéaste fait l’option de la comédie pour traiter ces sujets graves. Calvaire, risque d’échec, risque de mort, colère et dispute sont entourés de comédie, de danse, de musique. Le couple y puise d’ailleurs sa force pour chasser le désistement et progresser. Atswei va retrouver son souffle vers la fin de l’histoire sous les airs d’une mélodie improvisée. C’est dire que face à des obstacles, l’expression de la joie est une arme. Les chrétiens parleraient de comment les israélites ont pu faire tomber les murs de Jéricho ou le combat contre Syrie juste au son des tambourins et des instruments à vent.
Le courage de Boi et de Atswei fait école. Au-delà de s’être fixé l’objectif d’accoucher l’enfant à Keteke en dépit de tout, leur force, c’est aussi leur attachement au moyen pour atteindre leur but: monter à bord du train. Ils sont restés constants et concentrés là-dessous. C’est ainsi que, juste en entendant le sifflement du train, ils se surpassent et arrivent à se sauver des mains de ce vieux « mangeur de bébé » chez qui ils se sont retrouvés au bout d’un chemin inconnu. Malheureusement, ils n’auront pas cette locomotive. Mais Boi est toujours déterminé. Le prochain train ne passera pas sans les prendre. Boi n’a pas hésité à se mettre dans les rails au prix de sa vie. Il réussit à immobiliser le train. Le couple monte. Atswei accouche d’une fille dans le train.
Il est ici question de ne point reculer face aux obstacles sur le chemin vers la réalisation de ses objectifs, et que les moyens pour y arriver s’arrachent. Le sénégalais Ibrahima Théo Lam, fondateur de Kiné-Incubateur dira qu’il ne faut pas attendre les moyens pour entreprendre. Dans un couple, la détermination dans une vision commune est déjà un moyen. Face au train, Boi a agi comme un disciple du chercheur béninois Valentin Agon qui enseignait dans un témoignage que face à un lion, il rugi aussi et fait reculer la bête sauvage. Mais juste où faut-il pousser le risque ? « Celui ou celle qui a un rêve ne s’arrête pas en chemin, il ou elle fonce. Mais il faut s’armer du courage, de l’audace, de la détermination, d’un mental fort et de l’ambition de surmonter tous les obstacles », affirmait Valentin Agon, lauréat du prix de l’innovation pour l’Afrique 2016.
Rappelons que « Wà cinéma » est un rendez-vous mensuel de Le Centre soutenu par l’Institut français du Bénin dans le but de faire renaître la culture cinématographique au Bénin et en particulier dans la commune d’Abomey-Calavi. Il est plus orienté vers les films africains ou en lien avec le continent. Prochain rendez-vous, le vendredi 1er décembre 2023.